Madame La Maire, Messieurs les Maires, Cher·e·s collègues,
Cette délibération de création d’une nouvelle société d’économie mixte de production d’énergie est très importante car elle marque une première étape à une politique énergétique de coopération pour l’écologie entre collectivités territoriales, politique indispensable face à l’incurie des gouvernements successifs qui fait que la France est aujourd’hui est en retard par rapport à ses objectifs européens et ses engagements mondiaux pris dans le cadre de l’Accord de Paris.
La question énergétique est sans doute le premier enjeu des réponses à la crise climatique. On le constate, c’est d’ailleurs un des éléments centraux du débat de l’élection présidentielle. La production et la consommation d’énergie sont aujourd’hui la première source d’émission de gaz à effet de serre. Il est crucial de transformer nos politiques publiques vers la modification profonde de nos modes de production et de consommation pour accélérer la sortie des énergies fossiles, pétrole, charbon, gaz naturel, mais aussi et je tiens à le rappeler, il est fondamental de d’abord réduire notre consommation d’énergie.
Il n’y aura de réponse crédible à la crise climatique sans réduction de notre consommation d’énergie par une politique d’économie d’énergie. Toute politique écologique doit avoir pour objectif la réduction du volume de consommation énergétique, permettre un réel découplage absolu entre la richesse produite et l’énergie consommée. Éviter tout effet rebond ou Jevons, c’est-à-dire éviter que de nouvelles productions d’énergie renouvelable entraînent de nouveaux usages, de nouvelles habitudes et donc in fine une hausse des consommations.
Alors oui, la création de cette nouvelle SEM ne constituera pas une réponse de grande envergure face à l’ampleur de l’urgence. Mais il s’agit d’une pierre supplémentaire à l’édifice de nos engagements et de notre action pour y parvenir. Ce nouvel outil de développement des énergies renouvelables et de récupération est plus que nécessaire car il y a encore tant à faire sur la trajectoire de la transition énergétique des territoires.
Le besoin de développer des énergies renouvelables et de récupération est tel qu’il est crucial de créer un nouvel acteur dédié, qui viendra en complément des autres opérateurs, que la ville, la métropole et la région mettent déjà ou prévoient de mettre en place (énergie de Paris, énergie IDF, SIPEnR…). Une logique territoriale est également la bienvenue car s’il est essentiel de décentraliser la production d’énergie, il y a néanmoins nécessité d’avoir des cohérences territoriales et le choix de l’axe Seine est pertinent. Il faut multiplier les coopérations territoriales, ici nous en avons un très bel exemple, et les élus écologistes espèrent qu’il pourra inspirer ailleurs en France. Le modèle français de production énergétique centralisée est une exception mondiale et elle constitue une impasse et une exception mondiale. Il a été la conséquence du choix du nucléaire dans les années 70 et 80, il y a 50 ans. Ne serait-ce que pour sortir de toute forme de vulnérabilité liée à une production unique en monopole dans notre pays, il faut développer un modèle énergétique décentralisé.
Les objectifs de cette SEM sont donc de développer d’ici 2030 une cinquantaine de projets représentant une puissance de près de 250 MWh d’énergie le long de la Seine. Cela permettra à la ville de Paris d’acheter des contrats d’achat d’électricité, plus connus sous l’acronyme anglais PPA (Power Purchase Agreement) afin de fournir à nos citoyennes et nos citoyens de l’énergie moins chère, moins dépendante des énergies importés comme c’est le cas aujourd’hui, expliquant la hausse des prix de l’énergie. Pour rappel pour vous donner des ordres de grandeur, et c’est pour cela que nous voterons cette délibération, la consommation d’énergie c’est 30 000 GWh en 2019 à Paris.
Le projet prévoit de diversifier les sources énergétiques : photovoltaïque, éolien, biomasse, géothermie, hydrogène, méthanisation, hydraulique ou encore valorisation de la chaleur fatale. Mais il est néanmoins indispensable de raisonner en filière pour faire des économies d’échelle, et pour garantir la pertinence territoriale de fournir de nouvelles offres énergétiques, notamment pour développer la filière biogaz en lien avec les territoires, la production de biodéchets et les productions agricoles.
Le groupe écologiste le répète : une stratégie de développement des énergies renouvelables et de récupération doit se faire avec une logique de coordination inter-territoires. Nous souhaitons que les projets soutenus par la SEM permettent de ne pas laisser certains territoires sur le carreau, et que la vision de production et de fourniture d’énergie se fasse dans une logique de circuit court et de prix accessible. Nous souhaitons que les différents opérateurs territoriaux travaillent conjointement pour assurer une production et une distribution pertinente qui se fasse de façon complémentaire et non en concurrence les unes avec les autres. Les territoires ne sont pas encore au niveau des ambitions nationales de production des énergies renouvelables et de récupération. Il faut avoir une vision du métabolisme territorial de la Seine, regarder tous les flux, les optimiser et les réduire. Attention à vouloir augmenter les transports, même décarbonnés. Une réelle politique écologique doit permettre une relocalisation des productions et non une hausse des biens importés, externalisant notre production de gaz à effet de serre.
Par ailleurs, il faudrait également dénucléariser la Seine. Comme je l’ai dit, notre choix de modèle de production énergétique est la conséquence du choix du nucléaire. Même s’il n’y a qu’une seule centrale nucléaire sur le Seine, à Nogent-sur-Seine dans l’Aube, celle-ci sera sensible aux conséquences du dérèglement climatique, que cela soit des crues ou plus fréquemment des canicules régulières et du niveau d’étiage qui bloque le refroidissement de la centrale nucléaire. De plus, le vieillissement du parc nucléaire français, fait qu’aujourd’hui nous sommes obligés d’importer une partie de notre électricité. Un tiers des centrales nucléaires est à l’arrêt pour des opérations de maintien. Au lieu de mettre des milliards dans l’EPR, il serait plus pertinent de les mettre dans les énergies renouvelables et de récupération.
Il faudrait augmenter les formes d’énergie produite à partir de la Seine : utiliser la chaleur de l’eau comme le fait déjà Climespace depuis 2002, utiliser l’énergie des courants fluviaux avec des hydroliennes comme sur le Rhône, de la micro-hydraulique.
Nous voterons ces deux délibérations car elles sont nécessaires, même si nous n’avons pas les mêmes objectifs qu’une partie des initiateurs de celles-ci.
Pour terminer, j’ai été surpris par la rédaction du pacte d’actionnaires. Heureusement que les actionnaires ne sont que des collectivités territoriales ou des acteurs à but non lucratif car ce texte est dans une logique très financière en terme de rentabilité.