Vœu relatif au secteur de la petite enfance à Paris

Déposé par Fatoumata KONÉ, Nour DURAND-RAUCHER, Raphaëlle RÉMY-LELEU, et les élu·es du groupe Les Écologistes.

Considérant qu’actuellement Paris totalise 1 140 établissements accueillant des jeunes enfants (EAJE), soit plus de 45 000 places, tous modes de gestion confondus ;

Considérant que ce sont 60% des enfants de 0 à 3 ans qui sont accueillis dans les crèches gérées ou subventionnées par la Ville de Paris, faisant de Paris un cas unique en France ;

Considérant ainsi, que parmi ces places, la Ville de Paris finance plus de 37 000 places en crèches, pour un total 457 EAJE, dont 28 en gestion externalisée (marchés de prestations de service ou délégations de service public) par le secteur privé à but lucratif, soit 6% des établissements municipaux ;

Considérant que la Ville de Paris a acheté des berceaux dans des crèches privées à but lucratif dans les secteurs géographiques déficitaires en place de crèche à partir de 2014 ; 

Considérant que L’IGAS et l’IGF considèrent que le financement public est systématiquement supérieur au coût de revient de la place pour le gestionnaire des crèches privées lucratives, les deux inspections pointant un niveau de rentabilité excessive  ;

Considérant en effet que ces établissements perçoivent des financements publics en répondant aux appels d’offre des collectivités, en percevant les prestations de service unique via les caisses d’allocations familiales lorsque des enfants sont inscrits dans ces établissements et en vendant des berceaux aux entreprises qui ensuite perçoivent un crédit d’impôt famille et déduisent l’achat de leur impôt sur les sociétés ;

Considérant que ce secteur représente 1,7 milliards d’euros et est piloté essentiellement par 4 opérateurs ;

Considérant néanmoins l’exigence de la Ville de Paris dans la conclusion de ses marchés en réduisant au minimum le critère prix pondéré par d’autres critères tels la qualité de l’accueil etc ;

Considérant la politique nationale qui ne cesse de déréguler le secteur en diminuant la réglementation, notamment dans le privé ce qui entraîne une dégradation de la qualité de l’accueil avec notamment des possibilités d’accueil en surnombre, un taux d’encadrement assoupli ou encore une baisse de l’exigence de diplômes dans certains cas ;

Considérant le rapport de l’Inspection Générale des Affaires Sociales parut le 11 avril 2023 sur la “Qualité de l’accueil et prévention de la maltraitance dans les crèches” mettant en lumière les abus de ces établissements privés à but lucratif ;

Considérant la sortie d’un nouveau livre, “les ogres” de Victor Castanet dénonçant des abus, des maltraitances physiques et psychiques au sein des crèches privées lucratives.

Considérant les 2 livres sortis en 2023 (“Le prix du berceau”et “Babyzness”) qui décrivaient des situations très préoccupantes chez les opérateurs privés ;

Considérant l’absence de réaction volontariste du gouvernement de l’époque suite aux mises en danger des enfants dénoncées par ces livres ;

Considérant les liens que la ministre de l’époque aurait entretenu avec ces entreprises, liens passés sous silence lors de la commission d’enquête parlementaire sur le modèle économique des crèches ;

Considérant la parution du rapport de la commission d’enquête parlementaire sur le modèle économique des crèches et sur la qualité de l’accueil des jeunes enfants au sein de leurs établissements adopté en mai 2024 ; 

Considérant le fait que les manquements de certains établissements vont parfois jusqu’au décès d’enfants comme ce fût le cas dans une crèche située à Lyon gérée par l’un de ces gros opérateurs en juin 2022 ;

Considérant le procès qui s’est déroulé le 23 septembre 2024 à Lille, où deux salariées de l’opérateur People and Baby étaient accusées de violences volontaires, physiques et psychologiques sur neuf enfants ;

Considérant que la Ville de Paris en tant que département, a un pouvoir de contrôle sur la totalité des EAJF à diverses échelles en fonction du mode de gestion ;

Considérant l’absence d’investissement national sur le secteur de la petite enfance entraînant le développement d’une offre privée et la dégradation des conditions de travail conduisant à un manque de 200 000 places en France selon un rapport de 2021 de l’Observatoire national de la petite enfance ;

Considérant la promesse du gouvernement de la création de 200 000 places d’ici 2030, objectif irréalisable au regard des difficultés que connaît le secteur quand nous savons que les 30 000 places annoncées entre 2018 et 2022 n’ont pas été créées et que la dépense publique en la matière a baissé en moyenne de 0,8% entre 2013 et 2021 ;

Considérant le morcellement des solutions offertes aux familles en matière de petite enfance et dont les objectifs politiques fixés sont rarement atteints ;

Considérant que le secteur de la petite enfance va  devoir faire face au départ à la retraite massif des assistantes maternelles, qui concernera 35 % des effectifs d’ici à 2030, et qui s’ajoute à la faible attractivité des métiers de la petite enfance, peu rémunérés et mal considérés ;

Considérant également qu’offrir des solutions de garde de qualité aux familles est une condition de l’égalité réelle entre les femmes et les hommes.

Sur proposition de Fatoumata KONÉ, Nour DURAND-RAUCHER, Raphaëlle RÉMY-LELEU et des élu·es du groupe Les Écologistes, le Conseil de Paris émet le vœu que la Ville de Paris :

  • Présente un état des lieux des places en crèches privées à but lucratif présentes dans notre Ville ;
  • Cesse les achats de berceaux par des appels d’offres avec des entreprises privées à but lucratif  ;
  • Réduise la part globale de ses places en crèches, en gestion externalisée par des entreprises privées à but lucratif ;
  • Prenne en compte les revendications des professionnel·les du secteur en revalorisant les salaires des agent·es et salarié·es du secteur de la Petite Enfance ;
  • Interpelle le gouvernement :
    • quant à la mobilisation des moyens nécessaires à la création des 200 000 places manquantes et la possibilité pour chaque famille qui le demande d’avoir une place en crèche publique ou en gestion associative ;
    • quant au passage d’un taux d’encadrement de 1 adulte pour 5 enfants que les enfants marchent ou non ;
    • quant à l’accompagnement de la revalorisation globale des agent·es et salarié·es du secteur de la petite enfance (attribution de la prime Ségur, augmentation des moyens alloués dans la Convention d’objectifs et de Gestion entre l’Etat et la CNAF etc);
    • quant aux carrières des professionnelles de la petites enfance, afin de leur permettre des évolutions et de prendre en compte la pénibilité.
  • Interpelle la Préfecture quant à la situation générale pour qu’elle accentue ses investigations en vue d’éventuelles fermetures d’établissements privés à but lucratif, coupables d’abus.

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