Alors que de nouveaux panneaux photovoltaïques viennent d’être installés, Dan Lert, l’adjoint au climat, annonce une série de mesures ayant pour objectif de faire entrer la capitale dans une nouvelle dynamique.
Dan Lert officie au côté d’Anne Hidalgo depuis juillet 2020, en tant qu’ adjoint en charge de la transition écologique, du Plan climat, de l’eau et de l’énergie. Il devait inaugurer cette semaine la mise en service de nouveaux panneaux solaires installés sur les toits d’une école du XVIIIe arrondissement. Mais la crise sanitaire a eu raison de cet événement censé marquer par les actes la promesse faite par Anne Hidalgo d’accélérer la transformation écologique de la capitale.
Où en est Paris dans sa feuille de route environnementale ?
DAN LERT. Les énergies renouvelables représentent 20 % de la consommation du territoire, dont 6 % produites localement. La mission que la maire m’a confiée est assez simple : accélérer la transition énergétique pour atteindre les objectifs du Plan climat de la Ville. A savoir, à l’horizon 2050, la neutralité carbone et la sortie des énergies fossiles remplacées en totalité par des renouvelables.
La marche est très haute. Cette décennie est donc celle de l’accélération. En 2030, nous devrons avoir réduit de 40 % les émissions de gaz à effet de serre et consommer à 45 % des énergies renouvelables, dont 10 % produites localement.
La mise en service de panneaux photovoltaïques est-elle une étape cruciale pour cela ?
Le premier défi, c’est d’abord la sobriété énergétique. Car la meilleure énergie est celle que l’on ne consomme pas. Cela passe par la rénovation massive des bâtiments et l’action vers des mobilités propres, afin de réduire de 50 % notre consommation énergétique d’ici à 2050, et de 35 % d’ici à 2030.
Mais effectivement, neuf centrales solaires ont été créées sur les toits d’écoles, de collèges ou de gymnases. Elles seront progressivement mises en service. Ce programme de 2 millions d’euros, subventionné à 65 % par la ville, est le fruit de la première coopérative solaire de Paris, EnerCit’IF. Issue du budget participatif, cette structure a lancé un appel à financements pour permettre aux Parisiens d’investir dans des projets d’énergies renouvelables. C’est elle qui gère les sites et revend l’énergie créée.
Contrairement à ce que l’on pense, Paris jouit d’un potentiel important en la matière. L’Apur a réalisé un cadastre solaire afin de cartographier les bâtiments intéressants. Il existe déjà 76 000 m2 de panneaux photovoltaïques, dont 13 000 sur les toits de la Ville.
Comment encourager la création d’autres centrales solaires ?
Nous allons lancer Energies Culteurs, un appel à projets qui s’inspire de ParisCulteurs, programme d’agriculture urbaine. L’objectif sera de cultiver de l’énergie sur les toits plats parisiens. La première édition proposera une quinzaine de sites municipaux. Avec 10 000 m2, soit de quoi alimenter 800 foyers, nous doublerons presque la surface aujourd’hui mise à disposition par la Ville. Pour la saison suivante, nous mobiliserons les entreprises afin d’augmenter très fortement les surfaces et les puissances installées. Plusieurs projets sont déjà à l’étude, comme sur le réservoir d’Eau de Paris de la Porte des Lilas, ou sur des bâtiments situés à côté de la Canopée des Halles.
Quels autres modes de production rendent les objectifs du Plan climat réalisables ?
Paris dispose d’atouts très importants. Notre réseau de chaleur urbain alimente l’équivalent de 500 000 logements en chauffage et les hôpitaux. Il distribue de la vapeur issue de l’incinération des déchets. Nous disposons aussi d’un réseau de froid qui fonctionne grâce à la Seine et rafraîchit bon nombre de bâtiments. Nous avons également des gisements très importants en matière de géothermie, qui alimentent déjà des quartiers entiers comme Clichy-Batignolles, la Maison de la radio… pour un équivalent de 10 000 logements. Nous avons aussi une grande capacité à innover. La mairie du XIe est par exemple chauffée grâce aux eaux usées, des logements sociaux grâce aux émissions d’un data center…
Comment gérer cette énergie nouvelle ?
Nous allons créer, d’ici un an, Energies de Paris, un peu à l’image d’Eau de Paris. Son statut juridique n’est pas encore défini. Il dépendra de son champ d’intervention. Une chose est sûre, ce sera un opérateur public, local. Avec pourquoi pas des filiales. Ce doit être un outil très puissant.
Quel sera son objectif ?
Toute la production des énergies renouvelables dont aura besoin la capitale ne pourra se faire à Paris. On ne peut évidemment pas y créer des champs d’éoliennes. A travers Energies de Paris, nous pourrons investir avec d’autres collectivités territoriales dans des sociétés de production d’énergies renouvelables situées en dehors des frontières du périphérique. Nous pourrons aussi acheter de manière groupée de l’électricité renouvelable, pour le revendre après soit à des Parisiens, soit à des petits professionnels, à des prix intéressants. Ce sera un outil très puissant pour booster les énergies renouvelables.
Entretien publié dans le Parisien le 23 mars 2021.